Véronique Martin, du bureau confédéral sortant, a présenté en préambule les grandes lignes et la méthode qui ont permis au congrès d’enrichir collectivement l’orientation de la CGT à l’occasion de son 53e Congrès, qui doit définir sa feuille de route. Elle a rappelé les origines de la CGT, en se référant au congrès de 1902 à Montpellier, qui a signé un tournant majeur pour une CGT qui deviendra un ensemble articulé autour de fédérations professionnelles et d’unions territoriales. Cette articulation professions-territoires est la base organisationnelle concourant à conquérir des droits, à transformer la société et à la débarrasser de toute oppression et exploitation capitaliste, dans le respect de notre environnement, par une juste répartition des richesses et dans un monde de paix.
Les évolutions, qu’elles soient technologiques, écologiques, économiques ou sociales, interrogent sur le fonctionnement et sur la manière de porter les orientations et revendications pour demeurer un syndicat de classe et de masse dans les conditions d’aujourd’hui. Dans cet esprit, le comité confédéral national des 29 et 30 juin 2021a débattu et décidé des thèmes du document d’orientation sur proposition de la direction confédérale.
Une partition en trois temps
Le document est décliné ainsi : le syndicalisme de rupture et de transformation sociale dans un monde du travail en perpétuelle évolution ; la reconquête de nos forces organisées et de notre audience électorale ; l’élévation et l’élargissement du rapport de forces. Premier thème : pour parvenir à construire une CGT forte, il faut avoir conscience de l’intérêt qui unit les syndiqués, à tous les niveaux de la CGT, pour faire vivre les valeurs dans le respect des statuts, en faisant vivre la démocratie dans l’organisation, du syndicat à la confédération en passant par les structures professionnelles et territoriales.
Second thème : la CGT doit donc se renforcer en s’adressant à l’ensemble du monde du travail, aux femmes, aux jeunes et moins jeunes qui s’interrogent sur sa structuration tout en respectant le fédéralisme et nos organisations territoriales. Elle doit tout mettre en oeuvre pour retrouver sa place de première organisation syndicale et permettre ainsi d’imposer sa vision de la société.
Enfin, troisième thème de ce projet de document : il faut créer les conditions de l’élargissement du rapport
de forces en menant la bataille des idées sur une base contemporaine et non pas sur des concepts archaïques, dépassés, comme le confirme l’actualité des luttes revendicatives. La démarche syndicale s’appuie sur le rapport de la CGT aux travailleuses et travailleurs, retraités, privés d’emploi, jeunes dans une recherche systématique et permanente de constructions revendicatives communes. Dans cette partie du document, il s’agit de définir le cadre dans lequel doit être conçu le rapport aux autres organisations syndicales, au monde associatif ou politique, en définissant aussi en quoi la démarche syndicale doit irriguer toute l’organisation, tant sur les lieux de travail que dans les territoires (commune, département, région), au niveau national, européen et international.
Un processus démocratique
Ces trois thèmes ont fait l’objet d’un 4-pages en amont de la sortie du projet de document mis à disposition des syndicats dès le printemps 2022. Il a été accompagné de courtes vidéos pour aider à l’organisation des débats et pour que les syndicats s’emparent de la préparation de leur congrès. Les membres de la commission ont répondu présent à chaque fois qu’ils ont été sollicités pour participer à des initiatives préparatoires dans les professions ou les territoires.
Conformément aux statuts, une commission du document d’orientation a été mise en place par la commission exécutive confédérale, composée de dix membres dont six sont issus de la direction confédérale sortante et quatre issus des organisations du CCN : deux unions départementales, une fédération et un comité régional.
La commission s’est réunie à vingt et une reprises et systématiquement après les onze présentations à la
direction confédérale afin de prendre en compte les propositions, commentaires et débats sur le contenu et
la rédaction du document.
Le 9 mars 2022, la CEC a validé l’architecture du document et les sujets à aborder dans les différents thèmes.
Le projet de document a été validé à une très large majorité lors de la commission exécutive confédérale du 18 octobre 2022, devenant ainsi le document de la direction confédérale sortante. Il a été envoyé à partir du 12 décembre dans les syndicats, qui ont pu dès sa réception procéder à son examen et travailler des amendements. 5 763 amendements ont été déposés, dont 4 167 (soit 72 %) directement par les syndicats dans le logiciel mis à leur disposition. Ces amendements émanent de 386 syndicats, soit 100 de plus qu’au dernier congrès. Ces syndicats sont issus de 26 fédérations et 87 unions départementales, actant ainsi une bonne représentation professionnelle et territoriale.
Une minorité d’amendements dont l’objectif était de substituer à l’intégralité du texte proposé ou paragraphe
par paragraphe un autre texte n’ont pas été retenus pour ne pas en arriver à refuser tous les autres
amendements soumis par les syndicats, donc à nier leur travail. Même si le volume des amendements était
plus important que lors des congrès précédents, tous les amendements ont été examinés et un avis a été
donné sur chacun d’eux. Ils ont été mis à la disposition de la commission élue qui, afin de respecter les délais
impartis, s’est réunie en trois sous-commissions, une par thème.
L’inclusion féminine actée
La commission en a débattu et décidé d’intégrer l’écriture inclusive dans le document d’orientation.
Il a été proposé de féminiser le texte définitif après son adoption par les délégués du congrès et avant son
envoi dans les syndicats après le congrès. Plusieurs syndicats ont adressé des contributions sans forcément
faire d’amendements sur le document. La commission a proposé que celles-ci servent à la réflexion et à l’analyse de la future direction confédérale sur les sujets portés. « Après l’enrichissement du document
d’orientation et sa finalisation, il reste la mise en oeuvre, ce qui engage toutes et tous, quel que soit le vote émis par les unes, les uns et les autres. C’est cela l’exercice de la démocratie », a conclu Véronique Martin.
Les chantiers revendicatifs du premier thème
Dans la foulée, Catherine Paris, de la CGT Éducation, a présenté les grandes lignes de l’enrichissement du préambule et du premier thème. Le préambule a fait l’objet de 307 amendements déposés par 117 syndicats, 114 ont été modifiés, 55 acceptés en l’état, et 138 non retenus. Le lien avec l’article 1 des statuts de la CGT – « La CGT est ouverte à tous les salariés, femmes et hommes, actifs, privés d’emploi et retraités, quels que soient leurs statuts social et professionnel, leur nationalité, leurs opinions politiques, philosophiques et religieuses » – y a été réaffirmé.
Il aborde le syndicalisme de rupture, porteur de transformation, de progrès social et environnemental dans
un monde du travail en perpétuelle évolution en y incluant nos revendications globales, notamment celle du Smic à 2 000 euros brut, la revalorisation devant faire l’objet d’un débat au sein des organisations dans
le cadre de la mise à jour des repères revendicatifs. Le premier thème a fait l’objet de 2 209 amendements déposés par 214 syndicats. 311 ont été acceptés en l’état, 942 ont été modifiés et 956 refusés, soit 7 amendements sur 10 retenus. Ils se sont concentrés principalement sur les questions liées aux services
publics, à la Sécurité sociale et au nouveau statut du travail salarié (NSTS). La commission a travaillé sur la
lisibilité de ces trois objectifs revendicatifs en les adaptant au contexte vécu par les salariés dans leur diversité, sans s’enfermer dans un postulat réducteur.